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Football Michel Zen-Ruffinen : « Je ne suis pas content d’avoir eu raison sur la FIFA »

Michel Zen-Ruffinen a démissionné de son poste de secrétaire général de la FIFA en 2002 en laissant un rapport prémonitoire accablant et d’une actualité brûlante. Après des années de silence, on l’a retrouvé. Avis d’expert.
Christian FRICHET. - 22 juin 2015 à 05:00 - Temps de lecture :
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Michel Zen-Ruffinen a longtemps œuvré dans l’ombre de Sepp Blatter.  Avant de décider de partir de la Fifa, en 2002.  Photo AFP
Michel Zen-Ruffinen a longtemps œuvré dans l’ombre de Sepp Blatter. Avant de décider de partir de la Fifa, en 2002. Photo AFP

D’ abord, que faites-vous aujourd’hui ? « J’ai partiellement repris mon boulot d’avocat, je fais pratiquement que du droit sportif, je faisais déjà beaucoup cela avant. Et j’ai créé une société d’événementiel sportif, essentiellement axé sur le football. Je monte des matchs, des camps d’entraînement... »

• Mais vous avez quitté la FIFA en 2002... « Oui après seize années. Ce fut comme un divorce, j’avais passé un deal avec Blatter, je menais à bien la Coupe du Monde 2002 puis j’arrêtais. Il n’était plus possible que l’on travaille ensemble, j’ai démissionné comme prévu. Les choses étaient claires entre nous. »

• Et comment ça s’est passé ? « On a analysé les choses, chacun a donné sa lecture. On a causé et on s’est serré la main, ça m’a permis aussi de voir la nouvelle FIFA, la situation entre nous s’est alors normalisée. Tout était dans mon rapport en 2002 ! »

• En clair ? « Pour moi la crise de 2002 aurait dû l’éclairer, il n’en a pas tenu compte, il a continué. Moi je ne pouvais pas mentir, je pouvais devenir procureur en Suisse, je ne pouvais pas quitter ma ligne de conduite. Lui m’a dit qu’il ne comprenait pas que je ne sois pas solidaire. Quand on fait partie d’une équipe, m’a-t-il dit, on reste groupé. »

• Les événements récents vous rappellent vos points de divergence de l’époque ? « Tout est dans mon rapport de 2002 ! Même si je pense que beaucoup de dérives se sont aggravées depuis un certain temps. »

• On peut parler d’un problème systémique ? « Plus on avance, plus il est compliqué et dangereux de gérer une organisation de cette taille. Il faut donc mettre en place des outils adaptés. Je regrette que les nombreuses crises traversées par la FIFA, Blatter n’en ait pas tenu compte, qu’elles n’aient servi à rien. Elles touchaient déjà certains membres proches de lui, elles auraient dû lui permettre de mettre de l’ordre. Seulement selon lui, on règle les problèmes dans la famille et pas autrement. Mais il n’y a pas que lui qui pense ainsi, et pas que dans le football. On a le sentiment dans le sport et dans le football en particulier qu’on est totalement autonomes, qu’on peut échapper aux lois. »

• C’est la singularité de la crise actuelle, elle ne se réglera pas en interne ? « Exact ! Voilà la grande différence et explique la violence de ce qui arrive. La police et la justice sont intervenues et en plus de façon spectaculaire car je pense qu’elles auraient pu être plus soft. »

Platini dirige remarquablement l’UEFA

• Quel sentiment vous anime devant ce qui arrive ? « On ne peut pas être satisfait même à ma place car la FIFA me fascine, c’est une organisation passionnante qui se trouve dans une situation catastrophique depuis sept mois maintenant. J’assistais l’autre jour dans une université suisse, à une intervention d’un haut dignitaire du football qui a commencé son discours en disant : je suis de la FIFA mais je ne suis pas corrompu ! C’est une image dramatique et franchement cela me rend triste, il y a quand même 400 personnes qui travaillent avec passion. Non, je ne suis pas content d’avoir eu raison ! Oui je savais qu’un jour le scandale éclaterait et que des problèmes toucheraient la FIFA. Nous y sommes et Blatter qui a quand même été élu démocratiquement encore une fois, est en fâcheuse posture. »

• Platini est-il le bon candidat pour la suite ? « C’est possible, en tout cas il dirige remarquablement l’UEFA. Compte tenu de la situation, on ne peut pas mettre un inconnu au pouvoir et je vois mal une autre personnalité. Il faut de l’expérience, l’âge compte aussi, le fait qu’il soit européen doit lui permettre de mener plus facilement des reformes suivant la loi suisse. »