La jeune femme est assise devant un mur sombre. Face caméra, elle lit son texte d’une voix parfois hésitante. Elle raconte, calmement, comment elle a « découvert » que les vaccins ne servaient à rien, étaient même dangereux, et servaient uniquement à enrichir leurs fabricants. Cette vidéo, appelée « témoignage d’une maman antivaccin », est partout sur Internet. Copiée à de multiples reprises, on la retrouve dans de nombreux groupes Facebook, sur YouTube, Twitter ou Dailymotion. Cette vidéo de huit minutes, initialement postée sur YouTube par son auteure, Mahève Guibert, a été vue plus de 1,5 million de fois – avant que les deux principales versions soient supprimées par Facebook et YouTube.
Facebook, YouTube et Amazon haussent le ton
Longtemps hésitantes sur ce sujet, qui touche à la fois à la santé publique et à la liberté d’expression, les grandes plates-formes en ligne ont haussé le ton contre les contenus « antivax » ces dernières semaines. Facebook a annoncé que les groupes antivaccin ne seraient plus trouvables dans son moteur de recherche, et qu’il ne serait plus possible de faire de la publicité sur ce thème. Amazon a retiré de son catalogue de vidéos à la demande Vaxxed, le film conspirationniste culte des « antivax » ; YouTube a démonétisé plusieurs vidéos connues sur ce thème, après un article du site américain Buzzfeed ; et le site de partage d’images Pinterest, très utilisé par les mères de famille aux Etats-Unis, a également bloqué toutes les recherches liées au rejet de la vaccination.
Les recherches les plus simples sur YouTube renvoient à des films complotistes
Cette prise de conscience rapide est aussi la conséquence d’une menace politique. Des élus californiens se sont récemment agacés de voir la facilité avec laquelle les vidéos et messages « antivax » se diffusaient sur les réseaux sociaux : le représentant (démocrate) Adam Schiff a écrit aux principales plates-formes pour leur demander d’agir. Mais ces changements rapides, appliqués en quelques semaines par les réseaux sociaux, ne se sont pas produits par hasard.
« Il a fallu des années d’efforts pour que les choses bougent », explique Renée DiResta, spécialiste américaine de la désinformation, qui avait fondé en 2015 une association de promotion de la vaccination en Californie.
« Les activistes pro-vaccins ont écrit à de multiples reprises sur la manière dont les algorithmes des réseaux sociaux ont touché leur mouvement : ces algorithmes suggéraient de manière proactive des contenus antivaccin au grand public. »
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